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Comment Monterrey a fait de moi une coureuse


Dimanche dernier, j’ai couru mon second semi-marathon à Monterrey et c’est ce qui m’a donné l’envie de vous parler de running. La course est pour moi inextricablement liée à mon expatriation : elle a donc toutes les raisons de figurer sur ce blog (un précédent article à ce sujet est disponible en anglais ici).

Je ne suis définitivement pas le type de personne dont on aurait pu imaginer qu’elle allait devenir un jour une coureuse régulière. Vous souvenez-vous de vos entraînements de sport à l’école (même si ça commence à faire un bail), les fameuses classes d’EPS (Education physique et sportive) comme on les appelait alors ? Vous y êtes ? Vous les revoyez ? Et bien moi, je les détestais. Dans mon cas, elles s’apparentaient plus à des séances de torture que tout autre chose. Bien que je m’étais prise de passion pour l’escalade et que je n’étais pas si mauvaise en gymnastique (merci Seigneur pour m’avoir donné cette souplesse), le reste était un enfer, en particulier les sports d’équipe : volley, handball, foot, rugby (qui était probablement le pire) et toute la clique ! L’unique qui trouvait grâce à mes yeux et que je pouvais parfois apprécier était le basket (même si clairement je préfère le regarder à la télé !) Enfin, l’athlétisme était « ok », en quelque sorte. Tout bien considéré, je n’étais en fait pas si mauvaise en endurance. Mais la conclusion était qu’en général, je n’étais pas douée en sport. Mes principales activités physiques étaient la danse (que je pratiquais en dehors de l’école) et le vélo : j’allais partout avec ma bicyclette.

Lorsque je suis arrivée pour la première fois à Monterrey il y a de ça presque trois ans j’ai très vite réalisé que j’allais avoir besoin d’une activité. A Monterrey, il est impossible de marcher car les trottoirs sont presque inexistants et la ville n’a pas été pensée pour les piétons. C’est LA ville de la voiture, très proche du modèle américain. Les transports en communs ne sont pas développés, fiables ou sûrs. Et s’il vous prend l’envie de prendre votre vélo, cela signifie que vous êtes prêt à mourir. La voiture est le seul moyen pour se déplacer dans la ville. N’en n’ayant pas eu une à ma disposition jusqu’à très récemment, j’ai été pendant longtemps une cliente régulière d’Uber… (bien moins cher au Mexique qu’aux Etats-Unis et en France, et plus sûr que le taxi).

A Paris, j’avais un abonnement dans une salle de sport où je me rendais toutes les semaines, mais je ne m’entraînais pas à un niveau élevé. Ce qui me maintenait en bonne santé était le fait que je marchais partout et tout le temps : je faisais presque tout à pieds. En vivant à Monterrey, j’ai pris conscience à quel point les européens marchent, en particulier dans les capitales européennes, et à quel point ce n’est finalement pas le cas partout. En sachant cela, l’unique moyen de rester en bonne santé est de s’investir dans une activité sportive quelle qu’elle soit.

Dans l’immeuble où je vivais avant mon déménagement qui a eu lieu en mars dernier, j’avais beaucoup de chance car je disposais d’une salle de sport : c’était donc un premier pas. Cependant, courir sur une machine n’a rien de bien exaltant. Autre chance, plus grande que celle d’avoir une salle de sport, j’avais Ivan ! Ivan était un voisin car il vivait dans le même immeuble (il a aussi déménagé), mais il est surtout un ami et un super coach sportif. Il sait ce que signifie vivre loin de « chez soi », connaît les enjeux de l’expatriation et est accro au sport. J’ai donc commencé à m’entraîner avec lui à la salle. Puis de ma propre initiative personnelle, j’ai commencé à courir en octobre 2016, il y a donc un an et demi. Andy et moi allions régulièrement courir ensemble (mais pas au même rythme) dans un parc et Ivan nous a récemment rejoint dans cette routine. Mais comment en suis-je donc venue à la course ? Premier aspect : la nécessité de bouger si je ne voulais pas me transformer en larve. Deuxièmement : le besoin d’avoir un challenge. Quand j’ai débuté la course, je ne trouvais pas d’emploi au Mexique et je commençais à me sentir sérieusement déprimée. J’avais besoin de quelque chose qui m’anime, qui m’énergise. Troisième point : voir Ivan faire autant de sport (il s’entraîne tous les jours !). Vous ne pouvez définitivement pas rien faire lorsque vous voyez que votre voisin déborde d’énergie. Je vous assure que cela créé un étrange sentiment de culpabilité. Enfin, quatrième et dernier aspect : la culture du « running » à Monterrey.

A Monterrey, il y a différents types de culture telle que celle que j’appelle la « culture de la viande » par exemple : les habitants de Monterrey et du nord en général mangent des quantités astronomiques de viande et la « carne asada » (barbecue) est la chose la plus courante que les gens font durant le weekend. Je ne m’y suis toujours pas habituée et pire encore, je mange encore moins de viande qu’avant mon arrivée (je n’en mangeais déjà pas beaucoup). Il y a également la « culture de la célébration » qui est propre à tout le Mexique : on fait la fête pour tout et on célèbre tout ce qu’il est possible de fêter. Les Mexicains organisent des événements quel que soit le prétexte : enterrement de vie de jeune fille/homme (généralement il y en a même plusieurs, entre amis, en famille…), baby shower avant la naissance d’un enfant (c’est très américain), posada (réunion familiale/amicale/professionnelle avant Noël), anniversaires (qui sont bien plus importants qu’en France) et encore bien d’autres. Il existe aussi une culture du yoga : beaucoup de gens pratiquent le yoga à Monterrey (pour ne pas dire tous). C’est tellement courant qu’il est bizarre d’avouer que non, vous ne faîtes pas de yoga. A cet égard, j’entre dans la catégorie de ces étranges gens car je n’ai tout simplement aucune patience pour cette activité. Enfin, il y a une culture de la course ! A Monterrey et son agglomération (San Pedro, Guadalupe, Apodaca, San Nicolas, Santiago), il y a toujours des courses organisées le week-end. Si je compare avec ma ville d’origine, Paris organise des courses mais de façon très ponctuelle : cela n’a rien à voir avec l’ampleur du phénomène à Monterrey.

En novembre 2016, soit un mois après avoir commencé à courir, j’ai participé à mon premier 10 km. Je l’ai fait en 1h05 et vous savez quoi ? Je me suis sentie tellement bien de l’avoir complété et d’avoir couru en tant que tel que j’ai continué à courir de plus en plus. Je n’aurais jamais imaginé que l’on puisse se sentir aussi bien en courant et je n’aurais jamais imaginé le sentiment d’accomplissement que cela procure. Au début, courir était douloureux, je le faisais par nécessité. Mais étonnamment, courir est devenu quelque chose que j’aime. Parlerais-je d’addiction ? Peut-être…car je cours désormais trois fois par semaine (en plus des entraînements pour renforcer les membres inférieurs) et cela me manque si je ne respecte pas cette régularité. Le fait de participer régulièrement à des courses organisées par la ville, par des entreprises ou par des associations le dimanche me stimule. Le fait de courir avec d’autres, autour d’un objectif commun, génère un phénomène d’émulation. Cela ne veut pas nécessairement dire être en compétition avec les autres : c’est en réalité courir AVEC les autres, tous ensemble. Cela a quelque chose d’énergisant. Enfin, plus que tout autre chose, cela encourage : si les autres le font, je peux aussi le faire !

Certains me demandent pourquoi je cours. C’est une question difficile. Comment la pire fille de la classe en sport est-elle devenue une coureuse ? A l’origine, je courais plus par nécessité : le besoin de bouger pour rester en bonne santé. Maintenant je cours pour des causes. Beaucoup de courses sont organisées au profit d’associations telle que Rosa Fuerte par exemple qui lutte contre le cancer du sein. Mais plus profondément, je pense que je cours pour me challenger moi-même. Courir dynamise et nous fait nous sentir plus puissant : courir donne confiance. Cela fait sentir libre. Je ne rivalise pas avec les autres mais avec moi-même. Je ne cherche pas le meilleur résultat : je recherche l’accomplissement, la réussite, la réalisation. J’adore courir, j’aime la difficulté à franchir les obstacles et j’aime particulièrement l’arrivée, le moment où je vois la « meta » au bout en face de moi et où je commence à courir plus vite parce-que mince, je suis vraiment en train de le faire !

Au total, j’ai participé à neuf courses : six courses de 10 km, une de 15 km et les deux dernières de 21 km. Je suis donc officiellement semi-marathonienne ! Alors que j’avais le projet de me préparer pour un marathon, j’ai dû réexaminer mon programme car je dois me faire opérer du pied droit dans un mois. Je souffre d’un hallux valgus (déformation osseuse) depuis environ 10 ans qui me fait désormais très mal et je cours donc d’une part dans la douleur, et d’autre part en-dessous de mes capacités. Problème : la récupération d’une telle opération est très longue…Le chirurgien a été clair : pas d’appui du pied pendant un mois et pas de course avant au grand minimum trois mois (cela peut être six dans le cas de certaines personnes…) Bien que tout le monde me dise que c’est pour mon bien (ce que je comprends parfaitement), cela va être très difficile pour moi car j’ai un grand besoin de bouger. Rester sur le canapé avec la jambe surélevée, très peu pour moi. Je suis inscrite à un dernier 10 km avant l’opération et à une course en août. Je ne pourrais alors peut-être pas courir mais j’y accompagnerai des amis en faisant le 5 km que j’exécuterai en marchant s'il le faut ! Hors de question que je reste à la maison.

Et le marathon dans tout ça ? Cela m’affecte de savoir que je vais perdre mes capacités durant les mois qui vont suivre l’opération et que la reprise va être difficile. Le marathon de Chicago est en novembre, donc beaucoup trop tôt. En revanche, Andy et moi avons commencé à se renseigner sur celui de Big Sur le long de la côte Pacifique aux Etats-Unis et qui a lieu en avril 2019 : c’est donc une possibilité et plus que ça un projet…

Quitter un pays pour un autre apporte un lot de changements et cela a parfois même un effet à double tranchant. Parfois c’est très positif et parfois c’est plus difficile, dépendant du lieu où l’on s’expatrie, des conditions, des moments, des personnes qui nous entourent et de notre propre état d’esprit. Dans tous les cas, cela apporte des milliers de nouvelles expériences qui nous font apprendre et qui nous forgent, qui nous donnent plus d’armes pour le futur, qui nous rendent plus fort. Mais surtout, vivre à l’étranger apporte des surprises et des choses auxquelles vous n’auriez probablement pas pensé ou bien que vous n’auriez peut-être jamais fait en restant dans votre zone de confort. Qui aurait parié que je me mettrais à la course ?

Et vous, avez-vous démarré de nouvelles activités en expatriation, qu’elles soient sportives, artistiques ou professionnelles ? N’hésitez pas à partager votre propre expérience !

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