Il y a des articles plus difficiles à écrire que d’autres. Celui-ci en fait définitivement partie. Je n’ai pas pour habitude d’écrire des articles politiques sur le blog, préférant me consacrer aux thèmes de l’expatriation, de l’immigration, des différences culturelles et des voyages au Mexique. Pourtant, face au « tapage » qui entoure la construction du Train Maya, je me sens aujourd’hui obligée de clarifier certains aspects du projet et de démontrer en quoi il aura des effets délétères sur le Mexique.
J’aborderai dans un premier temps en quoi consiste le projet du Train Maya. Puis je présenterai ses supposés bénéfices. Enfin, je détaillerai les conséquences – environnementales, sociales, économiques, archéologiques – de cette méga construction au milieu de la forêt vierge du Yucatan.
Toutes les sources sont listées à la fin de cet article.
En quoi consiste le Train Maya ?
Long de 1 525 kilomètres, le Train Maya est un projet ferroviaire interurbain, dont la mise en œuvre vise à relier le Chiapas, au sud-est du pays, à la péninsule du Yucatan.
Route du projet
C’est le consortium français Alstom-Bombardier qui a remporté la licitation menée par le gouvernement mexicain et qui a donc la charge de la conception, fabrication et mise en service de 42 trains ainsi que de l’ensemble du système de signalisation. Le groupe a également pour mission d’assurer la conception, approvisionnement et installation de la technologie ETCS[1] (European Train Control System), composante majeure de signalisation et de contrôle des trains. Enfin, le consortium a aussi la charge de la construction des ateliers et garages de maintenance ainsi que la responsabilité du service après-vente des équipements du système.
Voici ce qu’a déclaré au mois de mai 2021, Maite Ramos, directrice générale d'Alstom México :
« Nous sommes extrêmement fiers d'avoir été sélectionnés pour fournir le Tren Maya - un train pour le Mexique, construit au Mexique - ainsi que son système de signalisation complet. Le design des trois types de trains – Xiinbal, Janal et P'atal [2]– est exclusif au Mexique et inspiré de la culture maya, où les lignes, la vitesse et la beauté du jaguar majestueux ont été des éléments d'inspiration pour le train. La fabrication du Tren Maya commencera immédiatement, avec une main-d'œuvre mexicaine, après la signature du contrat ».
Quels sont les bénéfices mis en avant par les acteurs du projet ?
1 – Un bénéfice commercial pour Alstom
Le contrat a été signé par Alstom-Bombardier mais aussi Gami Ingeniería e instalaciones et Construcciones Urales Procesos Industriales. Sa valeur totale s’élève à 1,3 milliards d’euros (plus de 31 milliards de pesos mexicains) dont près d’un milliard d’euros revient à Alstom-Bombardier.
« Nouveau succès commercial d'envergure pour Alstom ! » titre Capital.
2 – Une plus grande mobilité
Photo: Alstom
Selon le communiqué de presse d’Alstom du 9 juin 2021, ce projet de grande envergure « devrait transformer la mobilité durable dans le pays » et ainsi améliorer la qualité de vie des populations locales et permettre une croissance du développement touristique.
Voici le lien de leur présentation: Proyecto del Tren Maya.
3 – Un développement économique local
L’entreprise française a annoncé que le projet du Train Maya générera 4 500 emplois directs et 7 500 emplois indirects, ce qui permettra un développement économique majeur pour la communauté. À cet égard, Alstom produira les 42 trains dans son usine de Ciudad Sahagún dans l’Etat d’Hidalgo, usine visitée le 4 avril dernier par Jean-Baptiste Djebbari, Ministre délégué auprès de la ministre de la Transition écologique, chargé des Transports, et Jean-Pierre Asvazadourian, Ambassadeur de France au Mexique.
Photo: Ambassade de France à Mexico
Voici ce qu’a déclaré Alstom à propos du projet :
« Chez Alstom, nous comprenons les défis locaux et individuels de délivrer et entretenir une infrastructure ferroviaire avec les plus hauts standards de qualité, sécurité, confort et technologie de classe mondiale. Le projet du Train Maya (Tsíimin K’áak en langue maya) sera l’une des plus grandes œuvres d’infrastructure de l’histoire du réseau ferroviaire du Mexique et une opportunité unique pour augmenter la croissance économique de la région sud-est à travers la création d’emplois et le soutien à la production locale, tout en préservant les espaces naturels, les écosystèmes et l’environnement, en favorisant le tourisme, et en sauvegardant les cultures locales indigènes. »
Je surligne délibérément la fin de leur communiqué car comment ne pas envisager les impacts environnementaux et sociaux d’un tel projet ?
Quelles seront les conséquences réelles de ce projet ?
Au-delà de la dimension économique, quelle est la viabilité sociale et environnementale du mégaprojet qu’est la construction et mise en circulation du Train Maya ?
1 – Une déforestation massive
L’itinéraire original du Train Maya devait passer par l’autoroute fédérale 307 qui fait la liaison entre Playa del Carmen et Tulum le long de la côte Caraïbe. L’objectif était alors d’éviter les zones où se trouvent des rivières souterraines et des cenotes – gouffres remplis d'une couche superficielle d'eau douce et produits par dissolution puis effondrement de terrains calcaires – nombreuses dans la péninsule du Yucatan.
Mais en janvier dernier, FONATUR (Fondo Nacional de Fomento al Turismo) annonça que le trajet du train avait été modifié et réorienté vers la forêt vierge. Or comment construire une voie ferrée au milieu d’une jungle ? En détruisant pas moins de 20 000 arbres à racines profondes. À l’heure où je rédige cet article, ce ne sont pas moins de 144 hectares de forêt qui ont été détruits, entraînant par la même la délocalisation de populations mayas. On ne peut s’empêcher ici de faire un rapprochement avec la déforestation massive de l’Amazonie opérée sous le régime de Jair Bolsonaro, l’actuel président du Brésil.
Cette opération de déforestation d’envergure a été dénoncée par Roo Moce Yax Cuxtal, une organisation civile environnementale de l’Etat du Quintana Roo, qui a également souligné l’absence d’études environnementales sérieuses préalables au projet. Laura Patiño Esquivel, présidente de l’association et activiste, a été directement témoin de véhicules de Grupo México, l’une des entreprises employées par FONATUR pour la construction du cinquième segment de la voie ferrée (tramo 5), en pleine opération de destruction. Voici ce qu’elle a rapporté en mars dernier :
« Dans les deux endroits où nous avons pu observer les opérations de destruction, nous n’avons vu aucun panneau soulignant ce qui va être construit sur cette zone ainsi que les permis de construction, rien du tout. C’est pour cette raison que nous dénonçons ces opérations à la Direction de l’Environnement de la ville. »
Photo: Moce Yax Cuxtal
Roo Moce Yax Cuxtal a également insisté sur l’absence d’études d’aucun type : environnementale, géologique, hydraulique ou encore socio-économique.
S’ajoute à la déforestation une perte de productivité des sols engendrée par le compactage, ce dernier étant provoqué par le déplacement des machines de construction et, dans le futur, les vibrations dues au mouvement des trains.
2 – La mise à mal de « Garra del Jaguar », réseau de grottes et rivières souterraines
Garra del Jaguar est un important réseau de grottes et rivières souterraines de la Riviera Maya, long de 46,4 kilomètres. Il s’agit d’un véritable labyrinthe souterrain, aujourd’hui menacé par le Train Maya, dont le trajet passe juste au bord de sa plus grande entrée : un énorme puit, large de 80 mètres et profond de 100 mètres, dont seules quelques colonnes soutiennent un toit de terre très fragile.
Tania Ramírez, spéléologiste et activiste, explique que ces grottes sont la principale réserve d’eau douce pour la faune et la flore ainsi que pour la population de la région. Elles renferment par ailleurs des vestiges archéologiques ainsi que les ossements d’animaux aujourd’hui disparus. Laura Patiño Esquivel a exprimé à cet égard :
« Il est très inquiétant que nous ne connaissions pas les études d’impact environnemental parce-que nous ne savons pas quelle est la viabilité du projet sur un écosystème extrêmement fragile, en-dessous duquel, dans le sous-sol, nous avons des grottes, des rivières souterraines et des cenotes, et en haut, une jungle avec une flore et une faune infinie, notamment des jaguars. »
Photo: sel-va me del tren
L’organisation Moce Yax Cuxtal, avec le soutien de citoyens, a demandé au président mexicain, Andrés Manuel López Obrador (AMLO), d’arrêter le projet du Train Maya en soulignant ses conséquences néfastes sur l’environnement mais la requête est restée sans suite.
3 – Des conséquences hydrauliques et la mise en danger du réseau aquifère
Tulum, 2015
L’élaboration de la voie ferrée va par ailleurs provoquer un changement des courants naturels, ainsi que de possibles accidents, et un mauvais traitement des résidus de construction, impliquant un risque de contamination des eaux tant superficielles que souterraines.
Otto von Bertrab, président de la Commission d’Ecologie Coparmex de la Riviera Maya, souligne qu’en plus de la faune et la flore, ce sont des centaines d’aquifères qui seront directement affectés entre Playa del Carmen et Tulum.
4 – Une fragmentation importante de l’habitat du jaguar, du puma et de la faune en général
Mais les conséquences néfastes du Train Maya ne s’arrêtent pas là et comprennent notamment un impact direct sur le comportement de la faune locale.
La division artificielle provoquée par la ligne ferroviaire entraîne en effet un risque d’interruption des couloirs biologiques naturels des espèces qui transitent à cet endroit. Des mailles afin d’éviter les risques de collision entre le train et les animaux, loin de résoudre un quelconque problème, vont créer ce que l’on appelle un « effet barrière » qui consiste à empêcher la mobilité des animaux. Or lorsque les animaux ne peuvent se mouvoir à leur gré, ils ne s’approvisionnent plus de la même manière et peinent à se reproduire, mettant ainsi leur espèce en danger.
Ce phénomène s’observera sur un très large périmètre puisque le Train Maya parcourra plus de 500 km dans la péninsule du Yucatan et traversera des zones de biodiversité majeures telles que Calakmul (723 185 hectares) et Sian Ka’an (528 147 hectares).
Le site de Sian Ka’an
Photo de moi prise en 2017
Le Mexique est un pays qui compte l’une des plus grandes biodiversités au monde mais le Train Maya la met aujourd’hui à mal. C’est pourtant cette richesse naturelle qui attire chaque année environ 40 millions de touristes : que verront-ils lorsque tout sera détruit ?
Au-delà de la division créée par les rails, le risque d’incendie sera élevé, mettant à nouveau en danger les espèces.
L’association Jaguar Wildlife Center, située à Playa del Carmen et dont l’objectif est la préservation de la faune sauvage, a également dénoncé le projet.
5 – La violation des droits civiques et humains
Aux conséquences environnementales viennent s’ajouter des conséquences sociales. Les communautés locales n’ont pas été informées avec transparence.
Valladolid, village du Yucatan
Lorsqu’un projet d’une telle envergure est envisagé, une « consulta indígena » (consultation indigène) est obligatoire. Différente de la « consulta ciudadana » (consultation citoyenne), instaurée par l’administration d’AMLO, elle est définie par la Convention 169 du Bureau international du Travail, relative aux peuples indigènes et tribaux, dont le but est de protéger les droits humains de ces dits peuples. L’objet de cette consultation qui apparaît dans cette convention est de garantir une information claire et de qualité lorsqu’un projet urbain a un impact direct sur le lieu de vie de ces communautés. Or cette mesure participative, qui s’est tenue entre le 15 novembre et le 15 décembre 2019, n’a pas respecté les modalités définies dans la Convention 169. C’est le Bureau du Mexique de la Haute commission des Nations Unies pour les Droits humains qui a signalé que les standards internationaux pour cette consultation n’avaient pas été respectés.
Depuis janvier 2020, des communautés de la péninsule du Yucatan, des collectifs et des organisations civiles se sont opposés au projet de développement du Train Maya, mettant en évidence que leurs droits n’avaient pas été respectés, mais le pouvoir judiciaire semble avoir retardé la gestion des plaintes.
Photo de la forêt tropicale prise en 2017
Miguel Anguas Rosado, du collectif Indignación et auteur revue politique Nexos, s’est ainsi exprimé :
« Les procédures administratives ont été retardées au niveau du pouvoir judiciaire. Il a été décidé que toutes les procédures de protections juridiques se concentreront au tribunal collégial du district relatif au travail du Yucatan. Cela fait que les affaires judiciaires sont encore plus retardées. » Et d’ajouter : « Le jugement prend du retard, ne se prononce pas et les droits humains sont violés. »
Janet Medina, de l’organisation Kanan Derechos Humanos, explique qu’il y a plusieurs « amparos » (protections juridiques) relatifs à l’accès à l’information et la participation publique. Il a notamment été dénoncé que lors d’une consultation publique de 2020, la délégation Semarnat (Secrétariat à l'Environnement et aux Ressources naturelles du Mexique) du Yucatan n’a produit les annexes éditées par la Manifestation d’impact environnemental que le dernier jour, et que, pour cette raison, elles n’ont pas pu être correctement vérifiées et analysées. Une suspension du projet a bien été ordonnée mais n’a pas été respectée. Janet Medina dit :
« Fonatur allègue que rien n’a été construit, qu’il s’agit juste de maintenance. »
Photo: Cuartoscuro
Par ailleurs, en 2020, alors que l’urgence sanitaire mondiale était déclarée dans le contexte de pandémie de COVID-19, le gouvernement fédéral a sollicité, à travers des directives et des décrets présidentiels, le maintien de la construction qui impliquait pourtant le déplacement des habitants. La santé et la vie, tant des ouvriers, forcés de continuer à travailler pour survivre, que des populations locales, essentiellement indigènes, fut mise en danger.
Le fonctionnement des tribunaux était alors paralysé sans donc aucun recours possible. Il n’y avait pas d’accès à la justice pour rapporter les incohérences, omissions et opacités des autorités en charge du projet, notamment sur les conséquences environnementales et socio-économiques, essentiellement pour les communautés mayas mais pas que : c’était ce que l’on pourrait appeler l’Etat d’ « in-défense ».
Enfin, le 22 février dernier, suite à une révision publique de la « Cuenta Pública 2020 »[3], l’ASF (Auditoría Superior de la Federación) a pointé que le projet du Train Maya n’identifie pas quels seront les impacts environnementaux qu’engendrera la construction de plus de 600 km de voie ferrée sur les trois premiers segments (Palenque - Chiapas jusqu’à Izamal - Yucatan), ni quelles seront les mesures de prévention écologique et combien sera investi à cet effet pour rétablir les espaces naturels endommagés.
6 – Des dommages archéologiques
L’ASF a également signalé dans les résultats de son audit que le projet du Train Maya présentait un risque archéologique.
Sian Ka’an
Du temps est en effet nécessaire afin de recenser et protéger toutes les pièces trouvées mais l’échéance de la construction est fixée à la fin 2023, ce qui n’est pas suffisant au vu de la quantité des pièces trouvées. En effet, l’ASF a rappelé que FONATUR avait elle-même rapporté qu’en 2020, 3 728 monuments avaient été identifiés sur les segments 1 à 4 et que 292 d’entre eux, soit 9%, nécessitaient excavation, analyse, restauration, conservation et dans ce cas précis, relocalisation. De plus, 136 autres monuments, soit 4%, requéraient des mesures techniques afin d’assurer leur conservation et protection.
Enfin, sur les segments 5, 6 et 7, 957 monuments archéologiques ont également été identifiés dont 58 se trouvent directement sur le trajet du Train Maya. FONATUR, bien qu’ayant rapporté ces éléments, n’a présenté aucun projet détaillé relatif à la préservation archéologique de ces monuments.
7 – Des vices économiques
L’ASF a également trouvé des anomalies numériques qui se chiffrent à plus de 44 millions de pesos (soit plus de 2 millions d’euros) dans la Cuenta Pública de 2020.
Voici quelques-unes de ces anomalies :
* Sur 9 733,9 millions de pesos alloués au projet, l’ASF a identifié que 382,3 millions n’avaient pas été rapportés : où sont-ils passés ?
* La voie ferrée passant par des zones privées, FONATUR a identifié un besoin de 128,8 millions de pesos afin d’indemniser les propriétaires. Pourtant, le rapport indique que seuls 117 millions de pesos ont été versés et rien n’est dit à propos des autres 11,8 millions de pesos restants.
* L’ASF a également détecté des irrégularités qui s’élèvent à 86 millions relatives à des paiements non-éligibles, dupliqués et travaux de construction dont il a été impossible de prouver leur réalisation.
* Le rapport transmis aux députés par David Colmenares, Auditeur supérieur de l’ASF, met également en évidence que FONATUR a autorisé plus de 38 millions de paiements indus relatifs au volume horaire de la main d’œuvre.
Le concept est simple : un montant précis est fixé dans un Plan de Travail, c’est-à-dire que l’on définie combien tel ou tel travail va coûter. Mais FONATUR a « gonflé » le volume horaire, au-delà du temps réel passé sur le chantier.
* Des irrégularités de près de 11 millions de pesos relatifs à des travaux préliminaires, construction de route et voies d’accès ont aussi été soulignées par l’ASF. En effet, les prérequis qualitatifs pour ces travaux (par exemple quantité minimum de ciment requise) n’ont pas été prouvés.
* Sur seulement deux années, le montant total de l’investissement estimé pour le projet du Train Maya a augmenté de 38 millions de pesos : des 141 millions évalués pour l’ensemble de la construction, nous sommes en 2021 passés à un investissement de presque 180 millions de pesos, soit une hausse de 26,9%. L’ASF a à cet égard signalé que FONATUR n’avait pas actualisé les indicateurs permettant d’évaluer la rentabilité du projet, tel que le calcul de la demande de transport de passagers et marchandises qu’aura le Train Maya lorsqu’il sera en circulation.
* L’opacité est encore plus grande lorsque l’on sait que FONATUR, au troisième trimestre 2021, a rapporté avoir investi seulement 33 millions de pesos dans le chantier, soit à peine 18,5% des 180 millions dépensés.
Il est courant au Mexique de normaliser l’inacceptable. C’est encore plus grave lorsqu’une entreprise française en est l’un des acteurs principaux, entreprise qui plus est soutenue par le gouvernement français.
La France se veut leader de la transition écologique mais cette ambition ne se limite-t-elle qu’à ses propres frontières ? Sommes-nous donc suffisamment hypocrites pour faire des leçons de morale à la terre entière (les Français sont bien connus pour être des donneurs de leçon) et dans le même temps, détruire les richesses naturelles d’autres nations.
Certains argueront que le Mexique est « décideur » et que c’est bel et bien le gouvernement mexicain et l’administration d’AMLO qui ont validé ce projet, que de toutes façons « cela se serait fait ». Mais doit-on être acteur d’un tel désastre écologique ? Au 21ème siècle, quand les scientifiques n’ont de cesse de nous alerter sur le réchauffement climatique ? Quand les écoles de commerce nous dispensent des cours d’éthique ?
Au moment où je publie cet article, le tribunal du Yucatan vient juste de suspendre la construction du 5ème segment (tramo 5) sous le motif que la « Manifestación de Impacto Ambiental (MIA) », c’est-à-dire l’autorisation en matière d’impact environnemental, n’avait pas été accordée.
Le juge Adrián Fernando Novelo Pérez a déclaré :
« Il y a lieu d’accorder la suspension de tout acte ayant pour finalité la continuation de la construction du 5ème segment, secteur sud, du Projet Train Maya. »
Il a ensuite expliqué que cette sentence avait pour but d’éviter des dommages environnementaux imminents difficiles, voire impossibles, à réparer. C’est la première fois que le pouvoir judiciaire se prononce contre le projet et que la sentence prend effet. Certains y verront peut-être un début, un espoir, mais ceux qui connaissent le Mexique savent qu’il ne s’agit que d’une question de temps, que cette entreprise de destruction massive suivra son cours.
Le projet du Train Maya démontre, une fois de plus, que ce sont les intérêts économiques qui priment sur tout le reste. Des intérêts économiques personnels, individuels, car soyons un honnêtes, nous savons que les populations locales, qui vivent bien souvent en-dessous du seuil de pauvreté, n’auront pas les moyens de se payer un billet à bord du Train Maya.
J’ai honte de mon pays et j’ai honte d’être Française. Je me mets à rêver de ces vastes étendues de forêt vierge habitées par des jaguars, des pumas, des iguanes et des chauves-souris. J’imagine toutes ces grottes souterraines, toutes ces cenotes et tous les secrets qu’elles renferment. Je me rappelle un voyage que j’ai fait il y a près de 7 ans maintenant où un guide m’avait fait découvrir de tels endroits, où je m’étais sentie toute petite et vulnérable au milieu de cette immensité cachée. N’était-ce donc juste un rêve ?
[1] ETCS calcule en permanence, pour chaque train, une vitesse maximale de sécurité avec signalisation en cabine à l’intention du conducteur et met en œuvre des systèmes embarqués qui reprennent le contrôle en cas de dépassement de la vitesse autorisée. Il y a, dans le cadre d’ETCS, normalisation des équipements au sol et des systèmes embarqués à bord des trains en respect des différents niveaux que connaît l'ETCS (source : Thales). [2] Xiinbal: wagon standard / Janal : wagon-restaurant / P’atal: wagon-couchette. [3] Cuenta Pública : rapport du Ministère des Finances et du Crédit Public, présenté à la Chambre des députés pour sa révision et son contrôle. Il comprend notamment les informations comptables et budgétaires relatives aux programmes en cours ainsi que des informations complémentaires relatives aux pouvoirs exécutifs, législatif et judiciaire, organes autonomes et toute entité du secteur parapublic.
SOURCES
* CEMDA, Centro Mexicano de Derecho Ambiental, Todo lo que tienes que saber sobre el Tren Maya
* WRI Mexico, El Tren Maya: Más allá de la deforestación, un tema de conectividad y biodiversidad, 22 novembre 2018
* Greenpeace, Tren maya, ¿cómo afectará el medio ambiente y los derechos de las comunidades?, 27 avril 2020
* Alstom, Le consortium dirigé par Alstom-Bombardier livrera le projet ferroviaire Tren Maya, 9 juin 2021
* Capital, Alstom décroche un énorme contrat au Mexique, 10 juin 2021 (il semble que le lien ait mystérieusement disparu mais il est toujours visible dans le moteur de recherches Google)
* El economista, Tren Maya-AMLO, licitación y Alstom-Bombardier, 12 juin 2021
* La jornada, Reportan deforestación de 144 hectáreas por obras del Tren Maya, 20 octobre 2021
* Expansión política, Deforestación por el Tren Maya, 27 janvier 2022
* Quinta Fuerza, Nuevo trazo del Tren Maya pasará encima del sistema de cuevas ‘Garra de Jaguar’, uno de los más grandes de México, 10 février 2022
* Reportero Ambulante, Salvando la “garra del jaguar”, 13 février 2022
* El economista, ASF alista auditorías al Tren Maya, 17 février 2022
* Forbes, ASF detecta irregularidades por 86 mdp en la construcción del Tren Maya, 20 février 2022
* La jornada, ASF detecta anomalías por más de mil 44 mdp en obras de Tren Maya, 20 février 2022
* Animal político, El Tren Maya se encarece: la ASF advierte que su costo pasó de 141 mil a 180 mil mdp, 21 février 2022
* Animal político, Ambientalistas denuncian que la tala de árboles por el nuevo trazo del Tren Maya ya comenzó en Playa del Carmen, 2 mars 2022
* El País, Garra de Jaguar: un viaje al laberinto subterráneo amenazado por el Tren Maya, 13 mars 2022
* Ambassade de France au Mexique, Visita a México de Jean-Baptiste Djebbari, Secretario de Estado de Transporte, 4 avril 2022
* Ciudadanos en red, Garra de Jaguar: ecosistema en riesgo de muerte por el Tren Maya, 7 avril 2022
* El Financiero, Freno a Tren Maya; juez ordena suspender construcción de tramo 5, 19 avril 2022
* Forbes, Frenan, otra vez, obras del tramo 5 del Tren Maya por daños ambientales, 19 avril 2022
* Animal político, Juez frena obras del Tren Maya en el Tramo 5 Sur, ante posible afectación ambiental, 19 avril 2022
* El Norte, Dan frenón al Tren Maya, 20 avril 2022
* Profil LinkedIn de Maite Ramos, Directrice Générale d’Alstom Mexico
* Forbes, Mujeres Poderosas | Maite Ramos, el reto de perder el miedo y creérsela, 19 juillet 2021