Incontournable de la gastronomie mexicaine quand on débarque à Mexico : le taco al pastor (dit taco de trompo au nord). Et pourtant, il n’a pas toujours été mexicain, ou tout du moins, le Mexique se l’est réapproprié pour en faire la version que nous connaissons aujourd’hui. Et si vous voyagions un peu dans le temps ?
Le taco al pastor est en réalité le descendant du shawarma libanais, du gyro grec et du döner kebab turc. En effet, au début des années 20, un mouvement de migrants libanais s’installa principalement dans la ville de Puebla à 135 km à l’est de Mexico. Ils y importèrent le fameux shawarma qui était alors constitué de viande d’agneau, de pain arabe, de vinaigre et d’épices variées.
Progressivement, les Mexicains substituèrent la viande d’agneau par la viande de porc, plus accessible et plus économique, et se réapproprièrent la recette de l’« adobo », ou marinade, qui enveloppe la viande. Chaque « adobo » est différent selon la taquería mais il est en règle générale composé de piments, vinaigre, épices et parfois jus d’orange. Selon sa recette, la couleur du pastor varie.
Lorsque le trompo n’est pas vraiment de couleur rouge, qu’il conserve la couleur naturelle de la viande, cela signifie qu’il a été préparé avec peu d’« adobo ». Au contraire, lorsqu’il est plutôt rouge, cela signifie que le trompo a été cuisiné avec beaucoup d’« adobo ».
Une variation du traditionnel taco al pastor est le pastor negro, préparé avec une pâte de couleur noire originaire du Yucatan à base d’ail, de piments, poivre, clous de girofle, cannelle et parfois oignon grillé. Ce mélange d’épices et de résidus de piments constitue le trompo negro.
Le taquero procède de la façon suivante : il superpose des morceaux fins et d’autres épais de viande sur une base verticale qui constitue le trompo qui se cuisine de préférence au charbon afin de lui donner une saveur légèrement fumée.
Enfin, le pastor est servi chaud sur une fine tortilla de maïs et s’accompagne traditionnellement d’oignon, de coriandre, de sauce et d’ananas : c’est le fameux taco al pastor.
Bien que l’origine de l’ananas sur le taco al pastor soit méconnue, il semblerait qu’elle remonte à la création du Tizoncito par Concepción Cervantes.
En 1966, Concepción Cervantes, veuve de 32 ans et mère de quatre enfants établit sa propre taquería dans la rue Tamaulipas de la Condesa. Son salaire de secrétaire et la pension de son défunt mari ne suffisaient pas à la faire vivre elle et ses enfants et la cuisine étant un don naturel pour elle, la taquería lui sembla une option opportune. Le local ne disposait pas de connexion au gaz mais elle installa un four au charbon et, avec l’aide de son associé Josué, commença à offrir les fameux tacos al pastor. Elle nomma la taquería El Tizoncito, le tizón faisant référence aux morceaux qui tombent du trompo et demeurent dans le charbon avant d’être raclés.
Les tacos étaient servis dans des feuilles de papier fin qui étaient ensuite comptabilisées afin de savoir combien de tacos le client avait consommé.
Le lieu acquit une large popularité et le local de la rue Tamaulipas devint rapidement trop petit, d’où la mise en place d’un « auto-service » : les clients se garaient à proximité de la taquería et attendaient d’être servis directement dans leur voiture. Devant l’ampleur du succès, Conchita établit une autre taquería à deux rues du local principal au croisement des rues Cholula et Campeche.
Au fil du temps les succursales se multiplièrent et la chaîne du Tizoncito est aujourd’hui l’une des plus importantes de la capitale.
Concepción Cervantes décéda en 2012 et le Tizoncito la revendique comme l’inventeuse du taco al pastor bien que son origine soit beaucoup plus ancienne. Une chose est certaine : c’est elle qui l’a popularisé.
Infinies sont les taquerías de Mexico qui servent le fameux taco al pastor, « pastor » faisant encore référence aux « pastores » ou bergers qui élevaient la viande d’agneau au Moyen-Orient. Chacune a sa clientèle d’habitués car les Mexicains tendent à avoir leurs taquerías de prédilection. Les tacos sont parfois mangés sur le pouce mais ils sont aussi symbole de convivialité, de moments de partage en famille ou entre amis. Enfin, ils sont bien souvent le remède à une longue nuit de fête bien arrosée.
Pour en savoir plus : visionner La Crónica del Taco sur Netflix
* Mon avis sur le Tizoncito
Je trouve personnellement les tacos du Tizoncito assez gras et Andy a eu une très forte intoxication alimentaire après y avoir mangé. C’est sûrement la faute à pas de chance mais je recommanderais plutôt les chaînes suivantes : El Califa (certes plus cher mais bon et très propre) et La Casa del Pastor.
En version street food, le puesto Los Rogacianos de la Roma à l’angle des rues Chiapas et Tonalá dans la Roma Norte face au petit supermarché Sumesa.