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Visite de la Casa Azul : la maison de Frida Kahlo.




Si seule la visite de la Casa Azul vous intéresse, vous pouvez cliquer directement sur la dernière section.


 

La vie de Frida Kahlo


Frida Kahlo naît en 1907 et meurt en 1954 à Mexico, d’un père allemand, photographe, émigré au Mexique et d’une mère mexicaine.


Elle grandit dans la Casa Azul, maison coloniale construite par ses parents en 1904 dans le quartier bourgeois de Coyoacán au sud de la capitale.


Enfant, elle souffre d’une poliomyélite qui lui laisse des séquelles corporelles, mais c’est un grave accident d’autobus en 1925, alors qu’elle est âgée de 18 ans, qui l’anéantit. Son abdomen et sa cavité pelvienne sont transpercés par une barre de métal, sa jambe et son pied droits souffrent de multiples fractures tandis que son bassin, ses côtes et sa colonne vertébrale sont brisés. Cet événement décisif dans la vie de Frida Kahlo est à l’origine d’une interminable séries d’opérations chirurgicales, d’alitement prolongé, de port de corsets en plâtre puis en métal, de fausses-couches et finalement d’une amputation de sa jambe droite en 1953, soit un an avant de mourir à l’âge de 47 ans. La douleur physique marque à jamais l’existence de la jeune femme et est omniprésente dans ses peintures.


En 1928, elle s’inscrit au parti communiste mexicain et rencontre cette même année le muraliste Diego, Rivera de 21 ans son aîné, qu’elle épouse l’année suivante. Le couple mène une relation à la fois compliquée et passionnée, marquée des deux côtés par des aventures extraconjugales, notamment bisexuelles de la part de Frida Kahlo.


Frida et Diego Rivera, 1931 - San Francisco Museum of Modern Art


En 1930, le couple emménage à San Francisco aux Etats-Unis car Diego Rivera est chargé de réaliser des peintures murales pour la bourse de San Francisco (San Francisco Stock Exchange) et l’école des Beaux-Arts de Californie (actuel San Francisco Art Institute). C’est à cette époque que Frida Kahlo fait la connaissance d’artistes et de mécènes.


Mais Frida subit deux graves fausses-couches et ne s’adapte pas au mode de vie américain qui la dégoûte. Ce sentiment est visible dans ses œuvres Autoportrait à la frontière du Mexique et des Etats-Unis et Ma robe est suspendue là-bas. C’est à cette même période, en 1932, que la mère de Frida décède et que Frida insiste pour rentrer au Mexique.


Autoportrait à la frontière du Mexique et des Etats-Unis, 1932 - Detroit Institue of Arts


Ma robe est suspendue là-bas, 1933 - Hoover Gallery, San Francisco


L’année suivante, le couple quitte les Etats-Unis et s’installe dans une maison du quartier de San Angel à Mexico construite par Juan O’Gorman, un ami architecte et peintre proche du fameux architecte Luis Barragán. Après que Frida découvre que Diego entretient une liaison avec Cristina, sa sœur aînée, le couple se sépare et Frida emménage seule dans un appartement du centre de la capitale puis part un temps à New-York avant de rentrer au Mexique fin 1935.


Elle réemménage alors avec Diego, mais cette fois-ci dans la Casa Azul où elle a grandi et le couple y accueille en 1937 Leon Trotsky et son épouse à qui le président Lazaro Cardenas a accordé l’asile politique. Frida et Trotski entretiennent alors une liaison.


Frida Kahlo et Leon Trotsky


En 1938, peu avant leur divorce, Diego et Frida accueillent le chef de file du mouvement surréaliste, André Breton, qui a été envoyé à Mexico par le Ministère des Affaires étrangères français afin de mener une série de conférences sur la poésie et la peinture en Europe à cette époque. Breton est admiratif de l’œuvre de Frida et l’invite chez lui en 1939 lors de la grande exposition sur le Mexique organisée par le gouvernement de Lazaro Cardenas à Paris à la galerie Renou et Pierre Colle. Frida Kahlo noue une amitié avec Jacqueline Lamba, l’épouse d’André Breton, et rencontre les artistes Pablo Picasso, Vassili Kandinsky et Yves Tanguy.


Frida Kahlo et Pablo Picasso


Mais l’exposition déplaît à Frida qui se défend d’être surréaliste et écrit : « On me prenait pour une surréaliste. Ce n’est pas juste. Je n’ai jamais peint de rêves. Ce que j’ai représenté était ma réalité. » En outre, seules 6 sur 27 œuvres sont exposées en raison de leur « crudité ». Elle écrit une lettre à son ami et amant photographe, Nickolas Murray, où elle lui fait part de son dégoût pour la gente intellectuelle parisienne : « Ça valait la peine de venir jusqu’ici pour comprendre pourquoi l’Europe est en train de pourrir, pourquoi tous ces incapables sont la cause de tous les Hitler et les Mussolini. »


En 1940, elle voyage à San Francisco afin de recevoir des soins particuliers pour une mycose aiguë à la main droite où elle recroise la route de Diego qui lui propose à nouveau de l’épouser. Elle accepte et le couple, lié par une amitié profonde, s’installe dans la Casa Azul après le décès du père de Frida.


Diego dans mes pensées, 1943 - North Carolina Museum of Art, Raleigh


En 1942, Frida Kahlo est élue membre du Seminario de Cultura Mexicana auprès de 25 autres artistes et intellectuels afin de promouvoir et fomenter la diffusion de la culture mexicaine, et, en 1943, elle enseigne la peinture à l’académie des Beaux-Arts de Mexico. Mais son état de santé s’aggrave et elle doit subir de nouvelles interventions chirurgicales au niveau de la colonne vertébrale.


La colonne brisée, 1944 - Fondation Dolores Olmedo, Mexico


En 1950, elle reste hospitalisée neuf mois et ce n’est qu’à l’issue de sept opérations qu’elle peut recommencer à peindre tout en restant alitée.



Au printemps 1953, une rétrospective de son œuvre, organisée par la photographe Lola Alvarez Bravo, est pour la première fois présentée au Mexique. N’ayant pas la capacité de se lever, elle se fait transporter dans son lit sur le lieu de l’exposition afin d’assister au vernissage.


L’été suivant, elle souffre d’une gangrène et sa jambe droite est amputée jusqu’au genou. Elle écrit : « On m’a amputé la jambe il y a six mois qui me paraissent une torture séculaire et quelques fois, j’ai presque perdu la tête. J’ai toujours envie de me suicider. Seul Diego m’en empêche, car je m’imagine que je pourrais lui manquer. Il me l’a dit, et je le crois. Mais jamais de toute ma vie je n’ai souffert davantage. J’attendrai encore un peu… », Journal, Février 1954



Cette même année, elle peint son ultime tableau, Autoportrait avec Staline, et c’est une pneumonie qui l’emporte le 13 juillet 1954 bien que certains défendent la thèse d’un suicide par surdose de médicaments. Voici les derniers mots de son journal : « J'espère que la sortie sera joyeuse… et j’espère bien ne jamais revenir ».


Le rêve (Le lit), 1940 - Collection privée


Suivant son souhait, elle est incinérée le 14 juillet. Elle avait en effet expliqué qu’elle avait trop souffert alitée tout au long de sa vie. Ses cendres reposent sur son lit dans la Casa Azul de Coyoacán.


L’art et le style de Frida Kahlo


Le personnage de Frida Kahlo reste controversé du fait de son engagement politique communiste alors qu’elle-même venait d’un milieu privilégié et que son mode de vie était loin d’être austère. Sa position féministe est également discutée, certains soulignant que Frida Kahlo était « enfermée » dans un mariage malsain, émotionnellement dépendante d’un homme qui lui manquait de respect.


Quelques petites piqûres, 1935 - Fondation Dolores Olmedo, Mexico


Cependant, au-delà de ses engagements et de son histoire personnelle, les peintures et le style de Frida Kahlo sont clés en histoire de l’art.


Tout le monde a en tête l’image de l’artiste vêtue de la tenue traditionnelle huipil (sa maman était originaire de Tehuantepec dans l’Etat de Oaxaca au sud du pays), les cheveux tressés en couronne sur sa tête surmontée de larges rubans colorés.


Couverture de la revue Vogue Paris, 1937


Frida entretenait son image d’artiste mexicaine dans le sens nationaliste du terme et écrivait ainsi : « Les gringas m’aiment vraiment beaucoup et remarquent toutes les robes et les rebozos que je porte. Leurs mâchoires se décrochent à la vue de mes colliers de jade et tous les peintres veulent que je pose pour eux. »


Frida Kahlo serait-elle une artiste « inclassable » ? Il est en effet difficile de la rattacher à un courant artistique précis. Bien souvent présentée comme surréaliste, l’artiste se défendait pourtant de peindre sa réalité, d’où le fait que certains la rattachent au réalisme magique.


* Le « réalisme magique » est une appellation qui fut introduite par le critique d’art allemand Franz Roh en 1925 et qui permet de désigner des peintures où des éléments « magiques » et « surnaturels » surgissent dans un environnement « réaliste ». Or il est bien question dans les œuvres de Frida Kahlo de lieux naturels où surviennent des manifestations étranges et oniriques.


On retrouve dans ses œuvres les thèmes du corps avec de très nombreux autoportraits, de la douleur, de l’identité, des racines mexicaines et de la nature. Découvrir les tableaux de Frida Kahlo offre un voyage narratif au travers de la vie de l’artiste. Ses œuvres racontent en effet sa propre vie et font référence à des moments vécus précis.


Hôpital Henry Ford (Le lit volant), 1932 - Fondation Dolores Olmedo, Mexico


Les deux Fridas, 1939 - Musée d’Art Moderne de Mexico


Le cerf blessé, 1946 - Collection Carolyn Farb, Houston


La Casa Azul


* Information importante

Il est nécessaire d’acheter ses billets à l’avance sur le site du musée afin de pouvoir effectuer la visite. Si vous souhaitez prendre des photos, vous devrez alors acheter à l’entrée un permis dont le coût s’élève à 30 pesos.


La Casa Azul est une vaste demeure coloniale implantée dans le quartier de Coyoacán au sud de Mexico, calle Londres 247. Elle s’organise autour d’un large jardin intérieur et se caractérise par sa couleur bleu électrique qu’a choisi Frida lorsqu’elle y réemménagea après le décès de son père.

C’est à cette période, dans les années 1930, que Diego Rivera s’acquitte des hypothèques et des dettes que Guillermo Kahlo, le père de Frida, avait contracté. Important photographe sous le gouvernement de Porfirio Díaz, Guillermo Kahlo avait perdu ses clients durant la Révolution mexicaine et les frais de santé de Frida suite à son accident d’autobus avaient endetté la famille.


C’est par ailleurs en 1937 que Frida et Diego acquièrent l’actuel jardin.


La maison est une ode au Mexique, remplie d’une multitude d’objets d’art populaire mexicain tels que des exvotos, des céramiques, des vases mayas, des calaveras, etc…


*Exvoto : objets typiques de l’art populaire mexicain, caractérisés par le syncrétisme, c’est-à-dire qui réunissent magie et religion. Au travers de ces objets, l’on invoquait des entités surnaturelles à qui on faisait offrande.


La cuisine


C’est une cuisine typiquement mexicaine avec sa large hauteur sous plafond, ses casseroles de cuivre accrochées au mur et son mélange de couleurs : le sol et la table jaune vif, rehaussés par le bleu et le vert. Ce choix n’est pas un hasard car lorsque l’on mélange du bleu et du jaune, on obtient du vert.


La cuisine est un lieu central de la vie quotidienne au Mexique. C’est la pièce où se préparent les guisos (différents types de plats mexicains que l’on peut rapprocher du ragoût), les tortillas et les sauces dans les molcajetes (mortiers en pierre). C’est aussi le lieu de rencontres entre filles, mères et grands-mères qui se prête aux confidences féminines. Frida Kahlo a ainsi elle-même raconté que c’est Lupe Marín, l’ex-femme de Diego Rivera, qui lui enseigna la recette du mole (sauce à base de cacao et de multiples épices).


La pièce maîtresse est le large foyer à charbon qui sert de cuisinière et qui est entièrement tapissé d’azulejos de Talavera, typiques de Puebla.


La salle à manger



Au mur, des peintures populaires du XIXe siècle, sur la table des nappes tissées à la main, provenant de différentes régions du pays et beaucoup de vaisselle de Puebla, Oaxaca, Michoacán et l’Etat de Mexico.


L’atelier



Il se situe à l’étage et on peut y voir le chevalet que Nelson Rockefeller offrit à Frida Kahlo. Il fut construit pour Frida en 1946 par l’architecte fonctionnaliste et ami de Diego Rivera, Juan O ’Gorman. Il se caractérise par l’usage de matériaux provenant du sud de la ville tels que la pierre volcanique et le basalte qui étaient utilisés par les aztèques dans la construction des pyramides. Dans le patio couvert de l’atelier, Frida et Diego dessinèrent un plafond de mosaïques et ornèrent les murs avec des escargots de mer et des pots servant de pigeonniers.


La chambre de Frida



Dans la prolongation de l’atelier, le lit à baldaquin frappe avec son miroir accroché au-dessus et qui permettait à l’artiste de se voir lorsqu’elle était alitée.



Mais en réalité, Frida possédait deux chambres, l’une dans la continuité de l’autre. La première lui permettait de se reposer dans la journée tandis que l’autre était réservée pour la nuit.



Dans le coin de cette dernière, une bibliothèque et au mur, des objets d’art populaire mexicain ainsi que cette citation de Frida à propos de sa maison : « Jamás, en toda la vida, olvidaré tu presencia. Me acogiste destrozada y me devolviste entera, íntegra. » / « Jamais de toute ma vie je n’oublierai ta présence. Tu m’as accueilli détruite et tu m’as rendu entière, intègre. »


La chambre de Diego se trouve quant à elle au rez-de-chaussée, proche de la cuisine.


La chambre de Diego


C’est en 1940, un an près leur divorce, que Frida et Diego se remarient et que Frida aménage un espace pour son mari.


Voici quelques éléments marquant de la chambre :


* Au-dessus du lit, une photo de Diego Rivera.

* Sur le lit, des coussins avec des broderies qui disent « Dos corazones unidos » (Deux cœurs unis) et « Despierta, corazón dormido » (Réveille-toi, cœur endormi).

* Dans la pièce un grand coffre de bois laqué de Michoacán qui montre des paysages mexicains.

*Enfin, au mur, une scène de charrería que l’on peut rapprocher du rodéo mais qui est en réalité plus complexe.


Le jardin



Il impressionne par sa taille, sa nature foisonnante et sa pyramide en son centre dessinée par Diego qui appréciait particulièrement l’art préhispanique. Si l’on fait l’effort de voyager dans le temps, il faut imaginer dans ce jardin Frida, entourée de ses animaux : des xoloitzcuintles (chiens typiques du Mexique), des perroquets, des singes, des paons et même un faon apprivoisé (aspect qui serait discutable aujourd’hui).


Autoportrait avec des singes, 1943 - Collection privée Jacques et Natasha Gelman, Mexico

Frida Kahlo dans son jardin



 

Selon le souhait de Frida, Diego transforma la maison en musée après son décès. Il fut inauguré en juillet 1958 soit 4 ans après sa mort. C’est Carlos Pellicer, poète, muséographe et ami proche du couple qui réalisa la muséographie à la demande de Diego.



Avant de mourir, Diego demanda à sa mécène et amie, Dolores Olmedo, de ne pas ouvrir la salle de bain attenante à sa chambre durant 15 ans. Dolores respecta sa volonté et elle maintint fermé cette pièce ainsi que la salle de bain de la chambre de Frida, une petite remise, une malle et une armoire. Lorsque 15 ans plus tard, le tout fut révélé, un groupe de spécialistes passa trois années entières à organiser, classifier et digitaliser les 22 105 documents, 1 387 photos, 3 874 revues et publications, 2 776 livres, des dizaines de dessins, objets personnels, robes, corsets, médicaments…La révélation publique de tous ces objets coïncida avec le centenaire de la naissance de Frida Kahlo.

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